La lecture

Le citoyen découvre et imagine son monde par la lecture. C’est parce que la lecture donne un sens aux signes qu’elle offre au lecteur un accès à la connaissance :
Lectur-A-4-1
Cet exercice de l’esprit qui exige une certaine attention dégage du temps pour la réflexion. Son efficacité dépend de plusieurs éléments et de plusieurs contextes :
Efficacite-4-1
Lors de chaque bond historique on a su préserver, produire et transmettre les connaissances grâce aux bibliothèques, aux monastères et aux universités, parce qu’à chaque bond on a su développer de nouveaux outils : le symbole, l’alphabet, l’imprimé et la télévision (chapitre 4, no 8). Avec l’Internet, nous abordons le prochain bond, chacun se déroulant dans une profonde inquiétude de la part des citoyens (chapitre 7, no 1).

L’être humain est toujours en état de non-équilibre parce qu’il vit dans un espace-temps lui aussi en mutations auquel il s’adapte grâce à son cerveau : il vit non seulement dans son monde, mais surtout en face de lui.

L’oeil est la seule interface entre l’être humain et ses environnements :

Interfac-4-1

Le rôle du cerveau

Son cerveau est un système intégré comprenant 100 milliards de connexions neuroniques et gliales (les synapses). Il fonctionne comme un tout. Ces mécanismes permettent au citoyen de s’adapter aux différentes circonstances. Pour ce faire, il utilise différentes aires spécialisées :

148149

Le traitement complémentaire

Les deux hémisphères du cerveau offrent deux traitements complémentaires d’une même information (chapitre 5) :

150

En fait, toutes les parties du cerveau sont nécessaires pour penser efficacement :

151

Un cerveau triunique

En fait, l’être humain possède un cerveau triunique, c’est-à-dire qu’il est UN, mais aussi le fruit d’une triple évolution. Il est constitué de trois formations superposées (voir ci-dessous) :

Le premier cerveau

Il est l’héritage de nos ancêtres reptiliens. Il permet de réagir physiquement aux stimuli.

Le deuxième cerveau

Il est l’héritage de nos ancêtres mammifères. Il permet de réagir aux aspects affectifs des images-écrans.

Le troisième cerveau

Il est l’héritage des homo sapiens. Il permet d’agir intelligemment.

Le cerveau est constitué par un ensemble d’aires spécialisées dont l’oeil est la seule porte d’entrée sur un monde qui est une source continuelle d’informations. Notre vision domine donc tous les autres sens ; nous sommes des êtres à prédominance visuelle.

Repères

Le cortex : une couche de neurones.

Neurones-4-1

Ci-dessous, on ne voit que l’hémisphère droit du cerveau :

152

En général, cette lecture se fait en trois étapes (voir le schéma ci-dessous ) :

1- Le système visuel : les sensations

On ne perçoit pas de façon globale ; notre regard, qui est en perpétuel mouvement, explore l’environnement. Le cerveau va reconstruire le monde extérieur à partir des indices perçus par l’œil.

L’oeil vu du dedans :

Yeux-4-1

Lorsqu’il est stimulé, l’oeil convertit en impulsions électriques les stimuli reçus de l’environnement qu’il envoie, via le système visuel (rétine, nerf optique, corps genouillés et chiasma), au cortex virtuel primaire, puis à l’aire de reconnaissance des formes vues. C’est l’étape de la granulation du réel :

153

Cette lecture se fait selon les relations d’ordre, de ressemblance ou de différence.

Comment comprendre ce qu’on a lu

  1. Le stimulus d’information est capté par l’œil (droit dans le schéma ci-dessous) et va rejoindre l’aire visuo-sensorielle.
  2. Puis des fibres transmettent le signal électrochimique à l’aire visuo-psychique où se fait la reconnaissance de la forme vue.
  3. La forme vue est ensuite transmise à la région du pli courbe et prend sa signification.
  4. De là à l’aire de Wernicke où la signification lue est transmise en signification entendue.
  5. Enfin, le tout arrive à l’aire de Broca où la forme entendue (le mot) va éveiller la commande motrice du mot :

1-1

2- Le système limbique : les émotions

À la base du cerveau, ce système comprend plusieurs glandes qui sont liées à l’émotion et à la motivation, donc à la vigilance et à l’attention. C’est celle-ci qui focalise le cerveau, donc qui décide si une information sera prise en compte.

La photo ci-dessous illustre les connections qui existent entre le système visuel (la rétine, le nerf optique, etc.) et le système limbique :

154

Ce système est lié aussi à la gérance du stress, c’est-à-dire à l’adaptation de l’organisme, aux diverses situations. Il comprend :

  • l’hypothalamus, qui est impliqué dans les émotions, donc lié au stress (à l’adrénaline) ;
  • l’amygdale, qui est impliquée dans l’établissement des liens sociaux (les comportements d’approche et d’amitié, notamment) ;
  • le thalamus réunit les différentes informations envoyées par les sens et est concerné par la vigilance ;
  • l’hippocampe, lié à la formation des mémoires à long terme. Il permet de visualiser des scènes spatiales, donc de consolider les cartes cognitives (qui permettent d’imaginer le futur). C’est lui qui va envoyer les stimuli vers les régions spécialisées du cortex.

La mémoire à court terme agit comme un filtre : elle ne retient que quelques éléments d’informations, durant quelques secondes (environ 20), avant de les acheminer aux mémoires longues. Ce que le cerveau « voit » à ce moment-là est très différent de l’image que l’œil a captée au tout début du processus.

L’œil voit, mais c’est le cerveau qui regarde, c’est-à-dire qui donne un sens aux images.

3- Les mémoires longues et le cortex préfrontal : les décisions

Le cerveau possède plusieurs aires associatives, c’est-à-dire plusieurs mémoires qui sont interreliées et qui comparent les données perçues avec les informations déjà mémorisées.
Il n’y a pas de zones qui opèrent isolément. Il y a des aires qui dominent lorsque l’être humain pose un geste. Ce sont des aires d’association et d’intention :
2-1
Les fonctions explicites
C’est-à-dire, les fonctions déclaratives qui concernent les modes de pensée et les souvenirs conscients. Elles utilisent :

  • la mémoire sémantique qui nous permet d’obéir à différentes règles ;
  • la mémoire épisodique qui nous donne accès à nos souvenirs ;
  • la mémoire autobiographique qui restitue notre identité ;
  • la mémoire sensorielle qui restitue nos souvenirs visuels, auditifs ou olfactifs. Etc.

Les fonctions implicites
C’est-à-dire procédurales qui concernent les savoir-faire. Elles utilisent :

  • la mémoire des habitudes (l’habituation) liée aux apprentissages (toujours se lever à la même heure, par exemple) ;
  • la mémoire corporelle qui facilite les activités automatiques (dactylographier) ;
  • la mémoire des goûts qui est responsable de notre attirance pour tel type d’aliment ou de musique ;
  • la mémoire associative qui nous permet de vivre dans un groupe d’intérêts et d’accepter ses règles. Etc.

Ces différentes mémoires tiennent compte du rôle de l’expérience de l’individu et de la culture de son groupe d’appartenance. C’est l’ensemble de ces aires spécialisées qui rend la mémoire opérationnelle. Simultanément, il y a aussi comparaisons avec les autres stimulations auditives, olfactives ou tactiles et les réactions à l’environnement (voir le paragraphe 3D plus loin).

Lorsqu’il veut résoudre des problèmes abstraits, le cerveau peut aussi imaginer, c’est-à-dire créer des représentations par imagerie mentale, c’est-à-dire des tableaux inédits. Il peut mieux raisonner quand on lui offre des schémas incitant son imagination à explorer des solutions pour trouver des réponses (par insights) (chapitre 9, no 5). Cette activité se fait à partir du cortex visuel associatif et met à contribution plusieurs aires corticales.

Le tout est ensuite envoyé au cortex préfrontal. Ainsi, par un feed-back constant, le cerveau est renseigné sur les résultats, ce qui lui permet d’établir un jugement , de prendre une décision (chapitre 1, no 1).

04_Cerveau-B

Repères

Cerveau-4-1

Voici une comparaison de capacité de mémoire :  32

Les quatre étapes historiques

Les 4 étapes de lecture sont liées au décodage de l’environnement par l’être humain tout au long de l’histoire, donc à l’apprivoisement de son espace de proximité. Elles sont donc liées à l’organisation de la connaissance dans le cortex de l’individu. Les étapes ne disparaissent pas avec l’arrivée d’une nouvelle, mais se superposent à celle-ci (comme un oignon, chapitre 1), tant et si bien que l’être humain utilise aujourd’hui la somme des dernières trois étapes. Ceci peut sembler complexe, mais, justement, la nouvelle société le devient aussi.

La lecture environnementale (- 50,000 et – 5000 ans)

Durant des millénaires, nos ancêtres ont balayé des yeux leur environnement à la recherche de sécurité et de nourriture. Il y a mille ans, c’était la lecture des rouleaux de texte, les statuaires religieux avec leurs symboles codés, l’héraldique des grandes familles nobles, les vitraux des cathédrales. les monuments historiques, etc. C’était une forme de scan à la recherche de signes « parlant » liés aux religions et aux cérémonies civiques

La lecture séquentielle (vers 1500)

Puis, est apparu le livre avec sa nouvelle organisation linéaire : paragraphes, chapitres, pagination, etc. Il a fallu cent ans pour passer de l’ancienne façon de lire au code typographique (1440-1540). La lecture est alors devenue séquentielle, même avec l’apparition du cinéma et de la télévision : séquences, traveling, zoom, etc.:

La lecture par hyperlien (1990)

Une nouvelle organisation du savoir apparaît avec le Web. Le lecteur voit un écran qui est lié à un autre écran qui est lié à un autre écran, etc. Il ne sait pas trop à quoi s’attendre. Même chose avec la schématique, où il reconstruit un sens à partir des éléments qu’il décode. Le code médiatique est aussi nouveau que le fut autrefois le développement du code typographique (combien d’années compter pour son appropriation ?)

La lecture immersive (2020 ?)

Ce sera une lecture où tout le corps humain participera au décodage à cause de son immersion : ambiance d’environnements (3D, réalité virtuelle, écran dôme ou 360 degrés, façades d’édifices ou de place publique, etc.). Ce sera une véritable boîte de Pandore.

157

Un support extérieur à la mémoire humaine

Le livre, le disque dur et le Cloud (voir ci-dessous) sont des mémoires artificielles qui prolongent la mémoire de l’être humain ; ce sont des béquilles technologiques en quelque sorte (chapitre 2, no 4). À chaque fois qu’un nouveau support médiatique a été inventé, il a impacté la façon dont le cerveau fonctionne en modifiant la façon dont les connexions neuroniques se lient entre elles. Ainsi, tout au long de l’histoire, cette plasticité du cerveau a permis au citoyen de s’adapter aux différentes mutations. Voici différentes externalisations de la mémoire dans l’histoire :

Memoire-4-1

Voir aussi les mémoires artificielles au chapitre 5, no 10 :

Le cerveau des jeunes

Actuellement, le cerveau des jeunes natifs du numérique (les Digital natives) est différent, culturellement, de celui de leurs aînés à cause de l’effet combiné du multitâche, du support omniprésent de l’image-écran, des hyperliens interactifs, etc. (chapitre 7, no 4Différent ne veut pas dire supérieur, mais que la mémoire, l’attention et la lecture sont modifiées chez les jeunes par ces nouvelles écritures médiatiques qui leurs servent quotidiennement d’interfaces avec la connaissance.

Les jeunes se soucient moins d’être informés que de savoir où trouver l’information. Les réseaux sociaux gonflent le culte du moi ce sont des sites d’autoreprésentation qu’ils utilisent pour montrer comment ils souhaitent être vus (chapitre 7, no 10).

L’interprétation

Celle-ci dépend de la culture du récepteur :

158

La lecture écran

Par rapport à la lecture sur papier, la lecture à l’écran ne rend pas les gens plus bêtes (référence à Nicholas G. Carr) ; elle est différente :
Comparai-4-1

Ce qui change

Nous transitons vers une pluralité de lecture où le citoyen choisira celle qui lui conviendra au moment voulu :

  • La lecture de l’écrit (lecture séquentielle, surtout vers 1500)
    La lecture de l’écrit débute avec l’arrivée des hiéroglyphes (-3300), puis des alphabets (-1200) et de façon plus organisée socialement avec l’invention de l’imprimerie (vers 1400). Dès son début ce fut une lecture pour et par la classe aisée, de 5 % à 30 % de la société dépendant des périodes.
Les deux sœurs, Auguste Renoir (1889)

Les deux sœurs, Auguste Renoir (1889)

Elle fut ensuite imposée à tous les citoyens par une scolarisation de masse lors du démarrage de l’ère industrielle (1700) pour répondre aux besoins de main d’oeuvre qualifiée.

L’écrit a toujours été liée à une culture d’élite.
(Voir les travaux de Walter J. Ong).

  • La lecture de l’écran (lecture grâce aux hyperliens, vers 1980)

    Cette lecture se développe avec l’arrivée des premiers ordinateurs, les Main frames et l’émergence de la télévision grand public (1960). Puis, avec la Société du spectacle, le multitâche, le courrier électronique et la micro-informatique elle s’impose à plus de 6% de la population mondiale (1980). Avec l’arrivée d’Internet 2 et du Web (1995) et des interdaces tactiles des tablettes et des téléphones intelligents (2007), elle est maintenant utilisée par plus de 23 % de la population mondiale.

    Une conférence à l’Institut Royal de Londres utilisant déjà des images-écrans (gravure de 1860, avec Michael Faraday).

    Une conférence à l’Institut Royal de Londres utilisant déjà des images-écrans (gravure de 1860, avec Michael Faraday).

    Elle s’accomplit en trois phases : un balayage (zapping ou surfing), puis une analyse et enfin une interaction-décision. C’est pourquoi on l’accuse de créer chez le lecteur une culture de la fragmentation. Elle donne un sens au message en décodant des séquences dynamiques d’images-écrans.

    Elle sert actuellement à accéder aux services et à introduire la participation citoyenne via les réseaux sociaux favorisant ainsi le développement des stratégies montantes (bottom-up).

    Parce que cette lecture à l’écran a considérablement multiplié les lecteurs avec ses sites participatifs à la YouTube, les spécialistes de l’élite en place jugent d’un mauvais oeil l’arrivée de tant d’« amateurs » et remettent en cause « la sagesse des foules ». Il est normal que cette lecture-participation, poussée par le fort courant de personnalisation, soit égocentrique à ses débuts ; néanmoins, narcissisme ou pas, il y a transformation du paysage culturel.

    Un hackaton dans une université américaine.

    Un hackaton dans une université américaine.

    Un vrai sujet d’inquiétude devrait plutôt être le brouillard qui s’installe entre information et opinion.

  • La lecture de nouvelles écritures médiatiques (lecture immersive, débute vers 2012)

    L’arrivée des smartphones et des tablettes a déclenché l’utilisation grand public d’affichages interactifs sans clavier (au doigt). Ses symboles sont empruntés à la culture populaire. Commence maintenant une phase expérimentale avec les environnements smart : le Visual big data, le concept mapping, la sérenpidité, l’architecture quantique, le Long data et l’Internet des objets, qui nous mène vers le 3D (L’Internet 3, celui des services).

    Les trois premiers secteurs de son développement sont la publicité, les jeux vidéo et les applications militaires. Le corps tout entier participera alors au décodage (apparition des casques de réalité virtuelle, écran 360 degrés ou dôme et des objets portables). Cette lecture offre une perception de soi beaucoup plus émotionelle, une intimité qui pousse l’être humain à réfléchir sur sa situation et qui lui donne l’audace d’agir ; le télélecteur pourra alors tenter d’apprivoiser ses environnements.

Lectur-C-4-1

La lecture

Le citoyen découvre et imagine son monde par la lecture. C’est parce que la lecture donne un sens aux signes qu’elle offre au lecteur un accès à la connaissance :
Lectur-A-4-1
Cet exercice de l’esprit qui exige une certaine attention dégage du temps pour la réflexion. Son efficacité dépend de plusieurs éléments et de plusieurs contextes :
Efficacite-4-1
Lors de chaque bond historique on a su préserver, produire et transmettre les connaissances grâce aux bibliothèques, aux monastères et aux universités, parce qu’à chaque bond on a su développer de nouveaux outils : le symbole, l’alphabet, l’imprimé et la télévision (chapitre 4, no 8). Avec l’Internet, nous abordons le prochain bond, chacun se déroulant dans une profonde inquiétude de la part des citoyens (chapitre 7, no 1).

L’être humain est toujours en état de non-équilibre parce qu’il vit dans un espace-temps lui aussi en mutations auquel il s’adapte grâce à son cerveau : il vit non seulement dans son monde, mais surtout en face de lui.

L’oeil est la seule interface entre l’être humain et ses environnements :

Interfac-4-1

Le rôle du cerveau

Son cerveau est un système intégré comprenant 100 milliards de connexions neuroniques et gliales (les synapses). Il fonctionne comme un tout. Ces mécanismes permettent au citoyen de s’adapter aux différentes circonstances. Pour ce faire, il utilise différentes aires spécialisées :

148149

Le traitement complémentaire

Les deux hémisphères du cerveau offrent deux traitements complémentaires d’une même information (chapitre 5) :

150

En fait, toutes les parties du cerveau sont nécessaires pour penser efficacement :

151

Un cerveau triunique

En fait, l’être humain possède un cerveau triunique, c’est-à-dire qu’il est UN, mais aussi le fruit d’une triple évolution. Il est constitué de trois formations superposées (voir ci-dessous) :

Le premier cerveau

Il est l’héritage de nos ancêtres reptiliens. Il permet de réagir physiquement aux stimuli.

Le deuxième cerveau

Il est l’héritage de nos ancêtres mammifères. Il permet de réagir aux aspects affectifs des images-écrans.

Le troisième cerveau

Il est l’héritage des homo sapiens. Il permet d’agir intelligemment.

Le cerveau est constitué par un ensemble d’aires spécialisées dont l’oeil est la seule porte d’entrée sur un monde qui est une source continuelle d’informations. Notre vision domine donc tous les autres sens ; nous sommes des êtres à prédominance visuelle.

Repères

Le cortex : une couche de neurones.

Neurones-4-1

Ci-dessous, on ne voit que l’hémisphère droit du cerveau :

152

En général, cette lecture se fait en trois étapes (voir le schéma ci-dessous ) :

1- Le système visuel : les sensations

On ne perçoit pas de façon globale ; notre regard, qui est en perpétuel mouvement, explore l’environnement. Le cerveau va reconstruire le monde extérieur à partir des indices perçus par l’œil.

L’oeil vu du dedans :

Yeux-4-1

Lorsqu’il est stimulé, l’oeil convertit en impulsions électriques les stimuli reçus de l’environnement qu’il envoie, via le système visuel (rétine, nerf optique, corps genouillés et chiasma), au cortex virtuel primaire, puis à l’aire de reconnaissance des formes vues. C’est l’étape de la granulation du réel :

153

Cette lecture se fait selon les relations d’ordre, de ressemblance ou de différence.

Comment comprendre ce qu’on a lu

  1. Le stimulus d’information est capté par l’œil (droit dans le schéma ci-dessous) et va rejoindre l’aire visuo-sensorielle.
  2. Puis des fibres transmettent le signal électrochimique à l’aire visuo-psychique où se fait la reconnaissance de la forme vue.
  3. La forme vue est ensuite transmise à la région du pli courbe et prend sa signification.
  4. De là à l’aire de Wernicke où la signification lue est transmise en signification entendue.
  5. Enfin, le tout arrive à l’aire de Broca où la forme entendue (le mot) va éveiller la commande motrice du mot :

1-1

2- Le système limbique : les émotions

À la base du cerveau, ce système comprend plusieurs glandes qui sont liées à l’émotion et à la motivation, donc à la vigilance et à l’attention. C’est celle-ci qui focalise le cerveau, donc qui décide si une information sera prise en compte.

La photo ci-dessous illustre les connections qui existent entre le système visuel (la rétine, le nerf optique, etc.) et le système limbique :

154

Ce système est lié aussi à la gérance du stress, c’est-à-dire à l’adaptation de l’organisme, aux diverses situations. Il comprend :

  • l’hypothalamus, qui est impliqué dans les émotions, donc lié au stress (à l’adrénaline) ;
  • l’amygdale, qui est impliquée dans l’établissement des liens sociaux (les comportements d’approche et d’amitié, notamment) ;
  • le thalamus réunit les différentes informations envoyées par les sens et est concerné par la vigilance ;
  • l’hippocampe, lié à la formation des mémoires à long terme. Il permet de visualiser des scènes spatiales, donc de consolider les cartes cognitives (qui permettent d’imaginer le futur). C’est lui qui va envoyer les stimuli vers les régions spécialisées du cortex.

La mémoire à court terme agit comme un filtre : elle ne retient que quelques éléments d’informations, durant quelques secondes (environ 20), avant de les acheminer aux mémoires longues. Ce que le cerveau « voit » à ce moment-là est très différent de l’image que l’œil a captée au tout début du processus.

L’œil voit, mais c’est le cerveau qui regarde, c’est-à-dire qui donne un sens aux images.

3- Les mémoires longues et le cortex préfrontal : les décisions

Le cerveau possède plusieurs aires associatives, c’est-à-dire plusieurs mémoires qui sont interreliées et qui comparent les données perçues avec les informations déjà mémorisées.
Il n’y a pas de zones qui opèrent isolément. Il y a des aires qui dominent lorsque l’être humain pose un geste. Ce sont des aires d’association et d’intention :
2-1
Les fonctions explicites
C’est-à-dire, les fonctions déclaratives qui concernent les modes de pensée et les souvenirs conscients. Elles utilisent :

  • la mémoire sémantique qui nous permet d’obéir à différentes règles ;
  • la mémoire épisodique qui nous donne accès à nos souvenirs ;
  • la mémoire autobiographique qui restitue notre identité ;
  • la mémoire sensorielle qui restitue nos souvenirs visuels, auditifs ou olfactifs. Etc.

Les fonctions implicites
C’est-à-dire procédurales qui concernent les savoir-faire. Elles utilisent :

  • la mémoire des habitudes (l’habituation) liée aux apprentissages (toujours se lever à la même heure, par exemple) ;
  • la mémoire corporelle qui facilite les activités automatiques (dactylographier) ;
  • la mémoire des goûts qui est responsable de notre attirance pour tel type d’aliment ou de musique ;
  • la mémoire associative qui nous permet de vivre dans un groupe d’intérêts et d’accepter ses règles. Etc.

Ces différentes mémoires tiennent compte du rôle de l’expérience de l’individu et de la culture de son groupe d’appartenance. C’est l’ensemble de ces aires spécialisées qui rend la mémoire opérationnelle. Simultanément, il y a aussi comparaisons avec les autres stimulations auditives, olfactives ou tactiles et les réactions à l’environnement (voir le paragraphe 3D plus loin).

Lorsqu’il veut résoudre des problèmes abstraits, le cerveau peut aussi imaginer, c’est-à-dire créer des représentations par imagerie mentale, c’est-à-dire des tableaux inédits. Il peut mieux raisonner quand on lui offre des schémas incitant son imagination à explorer des solutions pour trouver des réponses (par insights) (chapitre 9, no 5). Cette activité se fait à partir du cortex visuel associatif et met à contribution plusieurs aires corticales.

Le tout est ensuite envoyé au cortex préfrontal. Ainsi, par un feed-back constant, le cerveau est renseigné sur les résultats, ce qui lui permet d’établir un jugement , de prendre une décision (chapitre 1, no 1).

04_Cerveau-B

Repères

Cerveau-4-1

Voici une comparaison de capacité de mémoire :  32

Les quatre étapes historiques

Les 4 étapes de lecture sont liées au décodage de l’environnement par l’être humain tout au long de l’histoire, donc à l’apprivoisement de son espace de proximité. Elles sont donc liées à l’organisation de la connaissance dans le cortex de l’individu. Les étapes ne disparaissent pas avec l’arrivée d’une nouvelle, mais se superposent à celle-ci (comme un oignon, chapitre 1), tant et si bien que l’être humain utilise aujourd’hui la somme des dernières trois étapes. Ceci peut sembler complexe, mais, justement, la nouvelle société le devient aussi.

La lecture environnementale (- 50,000 et – 5000 ans)

Durant des millénaires, nos ancêtres ont balayé des yeux leur environnement à la recherche de sécurité et de nourriture. Il y a mille ans, c’était la lecture des rouleaux de texte, les statuaires religieux avec leurs symboles codés, l’héraldique des grandes familles nobles, les vitraux des cathédrales. les monuments historiques, etc. C’était une forme de scan à la recherche de signes « parlant » liés aux religions et aux cérémonies civiques

La lecture séquentielle (vers 1500)

Puis, est apparu le livre avec sa nouvelle organisation linéaire : paragraphes, chapitres, pagination, etc. Il a fallu cent ans pour passer de l’ancienne façon de lire au code typographique (1440-1540). La lecture est alors devenue séquentielle, même avec l’apparition du cinéma et de la télévision : séquences, traveling, zoom, etc.:

La lecture par hyperlien (1990)

Une nouvelle organisation du savoir apparaît avec le Web. Le lecteur voit un écran qui est lié à un autre écran qui est lié à un autre écran, etc. Il ne sait pas trop à quoi s’attendre. Même chose avec la schématique, où il reconstruit un sens à partir des éléments qu’il décode. Le code médiatique est aussi nouveau que le fut autrefois le développement du code typographique (combien d’années compter pour son appropriation ?)

La lecture immersive (2020 ?)

Ce sera une lecture où tout le corps humain participera au décodage à cause de son immersion : ambiance d’environnements (3D, réalité virtuelle, écran dôme ou 360 degrés, façades d’édifices ou de place publique, etc.). Ce sera une véritable boîte de Pandore.

157

Un support extérieur à la mémoire humaine

Le livre, le disque dur et le Cloud (voir ci-dessous) sont des mémoires artificielles qui prolongent la mémoire de l’être humain ; ce sont des béquilles technologiques en quelque sorte (chapitre 2, no 4). À chaque fois qu’un nouveau support médiatique a été inventé, il a impacté la façon dont le cerveau fonctionne en modifiant la façon dont les connexions neuroniques se lient entre elles. Ainsi, tout au long de l’histoire, cette plasticité du cerveau a permis au citoyen de s’adapter aux différentes mutations. Voici différentes externalisations de la mémoire dans l’histoire :

Memoire-4-1

Voir aussi les mémoires artificielles au chapitre 5, no 10 :

Le cerveau des jeunes

Actuellement, le cerveau des jeunes natifs du numérique (les Digital natives) est différent, culturellement, de celui de leurs aînés à cause de l’effet combiné du multitâche, du support omniprésent de l’image-écran, des hyperliens interactifs, etc. (chapitre 7, no 4Différent ne veut pas dire supérieur, mais que la mémoire, l’attention et la lecture sont modifiées chez les jeunes par ces nouvelles écritures médiatiques qui leurs servent quotidiennement d’interfaces avec la connaissance.

Les jeunes se soucient moins d’être informés que de savoir où trouver l’information. Les réseaux sociaux gonflent le culte du moi ce sont des sites d’autoreprésentation qu’ils utilisent pour montrer comment ils souhaitent être vus (chapitre 7, no 10).

L’interprétation

Celle-ci dépend de la culture du récepteur :

158

La lecture écran

Par rapport à la lecture sur papier, la lecture à l’écran ne rend pas les gens plus bêtes (référence à Nicholas G. Carr) ; elle est différente :
Comparai-4-1

Ce qui change

Nous transitons vers une pluralité de lecture où le citoyen choisira celle qui lui conviendra au moment voulu :

  • La lecture de l’écrit (lecture séquentielle, surtout vers 1500)
    La lecture de l’écrit débute avec l’arrivée des hiéroglyphes (-3300), puis des alphabets (-1200) et de façon plus organisée socialement avec l’invention de l’imprimerie (vers 1400). Dès son début ce fut une lecture pour et par la classe aisée, de 5 % à 30 % de la société dépendant des périodes.
Les deux sœurs, Auguste Renoir (1889)

Les deux sœurs, Auguste Renoir (1889)

Elle fut ensuite imposée à tous les citoyens par une scolarisation de masse lors du démarrage de l’ère industrielle (1700) pour répondre aux besoins de main d’oeuvre qualifiée.

L’écrit a toujours été liée à une culture d’élite.
(Voir les travaux de Walter J. Ong).

  • La lecture de l’écran (lecture grâce aux hyperliens, vers 1980)

    Cette lecture se développe avec l’arrivée des premiers ordinateurs, les Main frames et l’émergence de la télévision grand public (1960). Puis, avec la Société du spectacle, le multitâche, le courrier électronique et la micro-informatique elle s’impose à plus de 6% de la population mondiale (1980). Avec l’arrivée d’Internet 2 et du Web (1995) et des interdaces tactiles des tablettes et des téléphones intelligents (2007), elle est maintenant utilisée par plus de 23 % de la population mondiale.

    Une conférence à l’Institut Royal de Londres utilisant déjà des images-écrans (gravure de 1860, avec Michael Faraday).

    Une conférence à l’Institut Royal de Londres utilisant déjà des images-écrans (gravure de 1860, avec Michael Faraday).

    Elle s’accomplit en trois phases : un balayage (zapping ou surfing), puis une analyse et enfin une interaction-décision. C’est pourquoi on l’accuse de créer chez le lecteur une culture de la fragmentation. Elle donne un sens au message en décodant des séquences dynamiques d’images-écrans.

    Elle sert actuellement à accéder aux services et à introduire la participation citoyenne via les réseaux sociaux favorisant ainsi le développement des stratégies montantes (bottom-up).

    Parce que cette lecture à l’écran a considérablement multiplié les lecteurs avec ses sites participatifs à la YouTube, les spécialistes de l’élite en place jugent d’un mauvais oeil l’arrivée de tant d’« amateurs » et remettent en cause « la sagesse des foules ». Il est normal que cette lecture-participation, poussée par le fort courant de personnalisation, soit égocentrique à ses débuts ; néanmoins, narcissisme ou pas, il y a transformation du paysage culturel.

    Un hackaton dans une université américaine.

    Un hackaton dans une université américaine.

    Un vrai sujet d’inquiétude devrait plutôt être le brouillard qui s’installe entre information et opinion.

  • La lecture de nouvelles écritures médiatiques (lecture immersive, débute vers 2012)

    L’arrivée des smartphones et des tablettes a déclenché l’utilisation grand public d’affichages interactifs sans clavier (au doigt). Ses symboles sont empruntés à la culture populaire. Commence maintenant une phase expérimentale avec les environnements smart : le Visual big data, le concept mapping, la sérenpidité, l’architecture quantique, le Long data et l’Internet des objets, qui nous mène vers le 3D (L’Internet 3, celui des services).

    Les trois premiers secteurs de son développement sont la publicité, les jeux vidéo et les applications militaires. Le corps tout entier participera alors au décodage (apparition des casques de réalité virtuelle, écran 360 degrés ou dôme et des objets portables). Cette lecture offre une perception de soi beaucoup plus émotionelle, une intimité qui pousse l’être humain à réfléchir sur sa situation et qui lui donne l’audace d’agir ; le télélecteur pourra alors tenter d’apprivoiser ses environnements.

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