Un système visuoculturel

L’être humain est d’abord et avant tout un système visuoculturel qui fonctionne grâce à un ensemble de règles :

  • la règle de Zipf : la longueur d’un mot est étroitement liée à la fréquence de son emploi ;
  • la règle de Miller : la mémoire à court terme ne retient que les quelque cinq ou six derniers items qui lui furent présentés ;
  • la fragmentation du réel par le système visuel, etc.

L’écrit pénètre lentement dans le cerveau parce qu’il est d’abord filtré par la culture, la mémoire et la grammaire, tandis que l’image y entre brutalement, c’est-à-dire directement et sans filtre :

L’écrit raisonne ; l’image résonne.

L’écrit analyse et explique, tandis que l’image-écran, qui est plus personnelle, donc émotive, suscite une opinion parce que chevauchant l’oralité du spectateur. L’écrit s’inscrit dans le temps, l’oral, dans l’immédiat. L’écrit a toujours été l’apanage des lettrés, tandis que l’oral et l’image sont les véhicules préférés des classes populaires. L’un ou l’autre ne sont pas supérieurs, ils sont différents.

Dans cette nouvelle société de l’image-écran qui émerge, on croit surtout à ce que l’on voit.

Aujourd’hui, nous sommes confrontés à une culture du tout à l’écran. Cette nouvelle culture est une autre étape dans la longue conquête de nos environnements.

La Préhistoire

L’image pariétale est utilisée par le chasseur-cueilleur pour « posséder » les animaux qu’il veut chasser. Les graphies préhistoriques sont surtout des manifestations destinées à conjurer le destin. C’est le premier acte d’une longue conquête historique de l’espace.

C’est une lecture prélogique ; une lecture magique qui, via l’intuition du chasseur, lui a permis de survivre durant des millénaires (schéma 10).

L’Antiquité et le Moyen-Âge

L’image idéographique accompagne la montée de l’écriture qui rationalise les efforts des bâtisseurs de premières Cités-États. Les princes et les grands prêtres utilisent l’écrit pour encadrer leur pouvoir (voir, par exemple, le Code d’Hammourabi datant de 1750 ans avant notre ère).

C’est une lecture raisonnée. Elle témoigne d’une intelligence qui devient, avec les siècles, de plus en plus rationnelle, linéaire et analytique.

L’époque industrielle

Les images cinématographiques et télévisuelles servent à conquérir non seulement de nouveaux espaces réels, mais aussi imaginaires.

C‘est une lecture plus globale, donc beaucoup plus émotionnelle qu’auparavant, parce qu’interactive. Elle témoigne d’une volonté de conquête de l’espace par le mouvement et la couleur.

L’ère postindustrielle

En ce moment, l’image des smartphones et des tablettes introduit le grand public dans le cyberespace, un nouvel espace-temps beaucoup plus virtuel. Viendront ensuite le 3D et l’immersif.

La lecture devient beaucoup plus personnelle. À cause des nombreux choix offerts, c’est une lecture qui devient hyperstimulante, exigeant beaucoup plus d’attention, donc plus stressante (voir l’économie de l’attention).

Ci-dessous, on voit l’augmentation de plus en plus importante des images, signes et symboles visuels à chaque bond de l’histoire :

05_historiq

La société dans laquelle l’homme vit et se pose comme être humain n’est rien d’autre qu’un vaste et complexe système de systèmes de signes.

(Umberto Eco)

C’est donc dans cette longue continuité historique qu’il faut placer les images-écrans d’Internet 2 ou le Web 2.0  :

  • des peintures pariétales durant la Préhistoire ;
  • aux vitraux des cathédrales au Moyen-Âge ;
  • aux gravures des encyclopédies lors de la Renaissance ;
  • le cinéma au début de la première partie de l’ère industrielle ;
  • la télévision lors de la deuxième partie de l’ère industrielle ;
  • et les images-écrans des contenus Web qui annoncent le changement dans la société (chapitre 3, no 11).

Nous forgeons nos outils et ils nous forgent en retour.

(Marshall McLuhan)

Il y a à peine quelques années, la compagnie Kodak régnait sur notre société industrielle (Kodak was the World Record Keeper) :

184

Notre monde appartiendrait-il maintenant aux smartphones ? L’an dernier, 3,5 trillions d’images-écrans furent capturées et échangées.

La plus importante fabrique d’images au monde est aujourd’hui la machine Hollywood ; c’est à cause d’elle que les icônes américaines deviennent, à travers la planète, nos mythes et nos modes. La deuxième machine est Bollywood (Bombay-Mumbay).

Repères

  • 1902 Le Voyage dans la lune, créée par Georges Méliès, est le premier succès commercial des trucages cinématographiques.
  • 1928 Mickey Mouse, créé par Walt Disney, est son premier court métrage à succès et Blanche-Neige, en 1938, son premier long métrage.
  • 1936 La machine de propagande de Goebbels fait basculer l’Allemage dans le nazisme.
  • 1960 Durant la campagne présidentielle américaine (Kennedy-Nixon), les idées politiques sont analysées pour la première fois via la télévision.
  • 1960 L’humanité voit la Terre depuis l’espace pour la première fois.
  • 1969 Apollo II avec la NASA (débarquement sur la lune de Neil Armstrong) ; c’est la première grand-messe médiatique planétaire.
  • 1991 Lors de la Guerre du Golfe, la diffusion publique des images est désormais contrôlée par les autorités militaires.
  • 1994 Les premières images de galaxies par le Télescope Hubble nous parviennent du fin fond de l’univers.
  • 2006 Twivage et vote par téléphone lors des émissions de télévision.
  • 2012 Lunette Google et casque de réalité virtuelle de Sony.

Il y a des images qui sont devenues des icônes, par exemple le manifestant inconnu de Tian’anmen (photo prise par Jeff Widener, de l’Associated Press, le 5 juin 1989 et relayée par YouTube) :

185

186

Schéma 12 : un monde tapissé d’écrans

  • Nous commençons à vivre dans un monde qui réagit de moins en moins à une culture de l’écrit et, de plus en plus, à une culture de l’image ; un monde que nous allons interpréter via les écrans des téléviseurs, des ordinateurs et des appareils mobiles (voir ci-haut).
  • Internet 2 devient ainsi un écosystème visuel numérique intégré et planétaire qui permet de rejoindre l’utilisateur où qu’il soit via des images-écrans.

Un système visuoculturel

L’être humain est d’abord et avant tout un système visuoculturel qui fonctionne grâce à un ensemble de règles :

  • la règle de Zipf : la longueur d’un mot est étroitement liée à la fréquence de son emploi ;
  • la règle de Miller : la mémoire à court terme ne retient que les quelque cinq ou six derniers items qui lui furent présentés ;
  • la fragmentation du réel par le système visuel, etc.

L’écrit pénètre lentement dans le cerveau parce qu’il est d’abord filtré par la culture, la mémoire et la grammaire, tandis que l’image y entre brutalement, c’est-à-dire directement et sans filtre :

L’écrit raisonne ; l’image résonne.

L’écrit analyse et explique, tandis que l’image-écran, qui est plus personnelle, donc émotive, suscite une opinion parce que chevauchant l’oralité du spectateur. L’écrit s’inscrit dans le temps, l’oral, dans l’immédiat. L’écrit a toujours été l’apanage des lettrés, tandis que l’oral et l’image sont les véhicules préférés des classes populaires. L’un ou l’autre ne sont pas supérieurs, ils sont différents.

Dans cette nouvelle société de l’image-écran qui émerge, on croit surtout à ce que l’on voit.

Aujourd’hui, nous sommes confrontés à une culture du tout à l’écran. Cette nouvelle culture est une autre étape dans la longue conquête de nos environnements.

La Préhistoire

L’image pariétale est utilisée par le chasseur-cueilleur pour « posséder » les animaux qu’il veut chasser. Les graphies préhistoriques sont surtout des manifestations destinées à conjurer le destin. C’est le premier acte d’une longue conquête historique de l’espace.

C’est une lecture prélogique ; une lecture magique qui, via l’intuition du chasseur, lui a permis de survivre durant des millénaires (schéma 10).

L’Antiquité et le Moyen-Âge

L’image idéographique accompagne la montée de l’écriture qui rationalise les efforts des bâtisseurs de premières Cités-États. Les princes et les grands prêtres utilisent l’écrit pour encadrer leur pouvoir (voir, par exemple, le Code d’Hammourabi datant de 1750 ans avant notre ère).

C’est une lecture raisonnée. Elle témoigne d’une intelligence qui devient, avec les siècles, de plus en plus rationnelle, linéaire et analytique.

L’époque industrielle

Les images cinématographiques et télévisuelles servent à conquérir non seulement de nouveaux espaces réels, mais aussi imaginaires.

C‘est une lecture plus globale, donc beaucoup plus émotionnelle qu’auparavant, parce qu’interactive. Elle témoigne d’une volonté de conquête de l’espace par le mouvement et la couleur.

L’ère postindustrielle

En ce moment, l’image des smartphones et des tablettes introduit le grand public dans le cyberespace, un nouvel espace-temps beaucoup plus virtuel. Viendront ensuite le 3D et l’immersif.

La lecture devient beaucoup plus personnelle. À cause des nombreux choix offerts, c’est une lecture qui devient hyperstimulante, exigeant beaucoup plus d’attention, donc plus stressante (voir l’économie de l’attention).

Ci-dessous, on voit l’augmentation de plus en plus importante des images, signes et symboles visuels à chaque bond de l’histoire :

05_historiq

La société dans laquelle l’homme vit et se pose comme être humain n’est rien d’autre qu’un vaste et complexe système de systèmes de signes.

(Umberto Eco)

C’est donc dans cette longue continuité historique qu’il faut placer les images-écrans d’Internet 2 ou le Web 2.0  :

  • des peintures pariétales durant la Préhistoire ;
  • aux vitraux des cathédrales au Moyen-Âge ;
  • aux gravures des encyclopédies lors de la Renaissance ;
  • le cinéma au début de la première partie de l’ère industrielle ;
  • la télévision lors de la deuxième partie de l’ère industrielle ;
  • et les images-écrans des contenus Web qui annoncent le changement dans la société (chapitre 3, no 11).

Nous forgeons nos outils et ils nous forgent en retour.

(Marshall McLuhan)

Il y a à peine quelques années, la compagnie Kodak régnait sur notre société industrielle (Kodak was the World Record Keeper) :

184

Notre monde appartiendrait-il maintenant aux smartphones ? L’an dernier, 3,5 trillions d’images-écrans furent capturées et échangées.

La plus importante fabrique d’images au monde est aujourd’hui la machine Hollywood ; c’est à cause d’elle que les icônes américaines deviennent, à travers la planète, nos mythes et nos modes. La deuxième machine est Bollywood (Bombay-Mumbay).

Repères

  • 1902 Le Voyage dans la lune, créée par Georges Méliès, est le premier succès commercial des trucages cinématographiques.
  • 1928 Mickey Mouse, créé par Walt Disney, est son premier court métrage à succès et Blanche-Neige, en 1938, son premier long métrage.
  • 1936 La machine de propagande de Goebbels fait basculer l’Allemage dans le nazisme.
  • 1960 Durant la campagne présidentielle américaine (Kennedy-Nixon), les idées politiques sont analysées pour la première fois via la télévision.
  • 1960 L’humanité voit la Terre depuis l’espace pour la première fois.
  • 1969 Apollo II avec la NASA (débarquement sur la lune de Neil Armstrong) ; c’est la première grand-messe médiatique planétaire.
  • 1991 Lors de la Guerre du Golfe, la diffusion publique des images est désormais contrôlée par les autorités militaires.
  • 1994 Les premières images de galaxies par le Télescope Hubble nous parviennent du fin fond de l’univers.
  • 2006 Twivage et vote par téléphone lors des émissions de télévision.
  • 2012 Lunette Google et casque de réalité virtuelle de Sony.

Il y a des images qui sont devenues des icônes, par exemple le manifestant inconnu de Tian’anmen (photo prise par Jeff Widener, de l’Associated Press, le 5 juin 1989 et relayée par YouTube) :

185

186

Schéma 12 : un monde tapissé d’écrans

  • Nous commençons à vivre dans un monde qui réagit de moins en moins à une culture de l’écrit et, de plus en plus, à une culture de l’image ; un monde que nous allons interpréter via les écrans des téléviseurs, des ordinateurs et des appareils mobiles (voir ci-haut).
  • Internet 2 devient ainsi un écosystème visuel numérique intégré et planétaire qui permet de rejoindre l’utilisateur où qu’il soit via des images-écrans.