Si l’imprimerie nous a donné la Renaissance, l’Internet va créer à son tour une nouvelle société dite de la connaissance. Il existe beaucoup de parallèles entre ces deux inventions :

Des débuts difficiles

On connaît les débuts difficiles de l’inventeur européen de l’imprimerie, Gutenberg, à cause des notes prises lors de son procès avec son associé Johan Fust (1455). Gutenberg inventa à la fois les caractères mobiles métalliques (il était orfèvre de métier), l’encre d’imprimerie et une presse à imprimer inspirée par les presses à vin du temps. Il imprima sa « bible à 42 lignes » en 1432.

On connait également les difficultés qu’a eues Tim Berners-Lee à convaincre les dirigeants du CERN du bien-fondé de créer le Web (1989). Celui-ci n’aurait pas probablement pas vu le jour s’il ne l’avait pas lancé individuellement.

Un nouveau style d’écriture

L’imprimerie telle que développée par Gutenberg a été une véritable révolution, car le lecteur a dû passer de la lecture sur rouleau qui existait depuis l’Antiquité vers la page. Cette nouvelle organisation de la connaissance est fondée sur la pagination, la table des matières, l’index, le titrage et les paragraphes. Plus d’une centaine d’années seront nécessaires au développement d’un véritable code typographique : Nicolas Jenson 1470, Aldus Manuce 1490, Claude Garamond 1530.

Aujourd’hui, surtout depuis l’arrivée des téléphones et des tablettes à écrans sans clavier (Steve Jobs, 2007), une nouvelle écriture commence à se développer (chapitre 5). Elle est moins linéaire et plus fluide que l’imprimé, faite d’amalgames de signes, de symboles et de bouts de textes affichés pêle-mêle à l’écran. Elle est également plus concentrée, plus visuelle, beaucoup plus synthétisée et plus émotionnelle, parce que plus proche de la culture orale.

Le contrôle de l’État

Les rois et les princes du temps ont essayé de contrôler cette technologie parce qu’elle avait un impact autant politique qu’économique dans leur royaume. À titre d’exemple, l’ordonnance de Montpellier du roi François 1er (1537, obligation de dépôt légal). En 1546, Étienne Dolet, libraire-imprimeur, fut torturé et brulé avec ses livres à Paris.

En 1998, le contrôle d’Internet fut placé sous la juridiction du Département du Commerce des États-Unis. L’ICANN contrôle aujourd’hui tous les noms de domaine et les adresses IP (DNS) dans le monde (c’est parce que l’ICANN a son siège social à Washington qu’il est soumis au droit américain). Devant cette hégémonie, le mouvement NETmundial fait la promotion d’une gouvernance plus ouverte, surtout suite à l’affaire Snowden, 2013.

Les autodafés.

L’État a toujours réagi violemment quand des livres contraires aux thèses officielles furent imprimés (Copernic en 1543, Giordano Bruno en 1600 et Galilée en 1633) ou quand on a osé traduire la bible en langage populaire (Martin Luther en 1523, William Tyndale en 1537 et Jean Calvin en 1542).

Voir les exemples récents des accusations de trahison et des tentatives d’emprisonnement de Julian Assange 2010, Bradley Manning 2010, Edward Snowden 2013 et Aaron Swartz 2013.

La réorganisation des connaissances

L’arrivée de l’imprimerie coïncide avec celle des premières grandes bibliothèques universitaires et surtout, lors de la Renaissance, avec une réorganisation du savoir autour des quatre facultés (arts, médecine, droit et théologie). Plus tard, un autre bond extraordinaire eut lieu avec le lancement de l’Encyclopédie de Diderot (1751-1772).

L’arrivée d’Internet oblige tous les réseaux scientifiques à se réorganiser, puis suscite l’apparition de Wikipédia (2001) et des grands projets de bibliothèques électroniques universelles : Google Livres (2004), Europeana de la Commission européenne (2008), la Bibliothèque numérique mondiale de l’UNESCO et de la Bibliothèque du Congrès américain (2009).

Les impacts de l’imprimerie
  • Finalement, en deux cents ans, beaucoup de citoyens devront apprendre à lire et à écrire.
  • Succédant à la culture orale du Moyen-Âge, la culture de l’écrit impose une approche linéaire et analytique faite surtout pour le contrôle, les inventaires et la production.
  • À la diffusion des livres religieux succède maintenant une multiplication des livres scientifiques.
  • Création de l’importante industrie du papier.
  • Développement de réseaux de distribution européens pour écouler les différents tirages.
  • Suscite la traduction des textes grecs et latins anciens.
  • Harmonise l’orthographe et la grammaire de la langue, donc codifie les langues vernaculaires, ce qui a eu un impact important dans la formation des identités nationales.

Les impacts de l’Internet

  • La démocratisation de la publication assistée par ordinateur (PAO) débute avec l’apparition du Macintosh (1984) ; l’ère de l’infographie en réseau commence.
  • Chez les professionnels de l’impression, les nouvelles étapes sont le Computer to plate et le Direct imaging.
  • La nouvelle génération de téléphones et de tablettes sans clavier (2007) fait émerger une nouvelle écriture médiatique (chapitre 5). À la culture de l’écrit commence à se superposer une culture des images-écrans.
  • La dématérialisation des services et des produits sous forme d’applications suscite une Net economy.
  • Les promoteurs des réseaux sociaux imposent à leurs usagers une contribution gratuite (sous les formes de détails personnels), laquelle développe une économie de la contribution qui les enrichit énormément (chapitre 6).
  • Deux modèles économiques commencent à se développer : un modèle privé et américain structuré autour de la sécurité et un modèle plus public basé sur les espaces de proximité (chapitre 6).

Voir ci-dessous les étapes d’Internet 1, 2 et 3 :

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Si l’imprimerie nous a donné la Renaissance, l’Internet va créer à son tour une nouvelle société dite de la connaissance. Il existe beaucoup de parallèles entre ces deux inventions :

Des débuts difficiles

On connaît les débuts difficiles de l’inventeur européen de l’imprimerie, Gutenberg, à cause des notes prises lors de son procès avec son associé Johan Fust (1455). Gutenberg inventa à la fois les caractères mobiles métalliques (il était orfèvre de métier), l’encre d’imprimerie et une presse à imprimer inspirée par les presses à vin du temps. Il imprima sa « bible à 42 lignes » en 1432.

On connait également les difficultés qu’a eues Tim Berners-Lee à convaincre les dirigeants du CERN du bien-fondé de créer le Web (1989). Celui-ci n’aurait pas probablement pas vu le jour s’il ne l’avait pas lancé individuellement.

Un nouveau style d’écriture

L’imprimerie telle que développée par Gutenberg a été une véritable révolution, car le lecteur a dû passer de la lecture sur rouleau qui existait depuis l’Antiquité vers la page. Cette nouvelle organisation de la connaissance est fondée sur la pagination, la table des matières, l’index, le titrage et les paragraphes. Plus d’une centaine d’années seront nécessaires au développement d’un véritable code typographique : Nicolas Jenson 1470, Aldus Manuce 1490, Claude Garamond 1530.

Aujourd’hui, surtout depuis l’arrivée des téléphones et des tablettes à écrans sans clavier (Steve Jobs, 2007), une nouvelle écriture commence à se développer (chapitre 5). Elle est moins linéaire et plus fluide que l’imprimé, faite d’amalgames de signes, de symboles et de bouts de textes affichés pêle-mêle à l’écran. Elle est également plus concentrée, plus visuelle, beaucoup plus synthétisée et plus émotionnelle, parce que plus proche de la culture orale.

Le contrôle de l’État

Les rois et les princes du temps ont essayé de contrôler cette technologie parce qu’elle avait un impact autant politique qu’économique dans leur royaume. À titre d’exemple, l’ordonnance de Montpellier du roi François 1er (1537, obligation de dépôt légal). En 1546, Étienne Dolet, libraire-imprimeur, fut torturé et brulé avec ses livres à Paris.

En 1998, le contrôle d’Internet fut placé sous la juridiction du Département du Commerce des États-Unis. L’ICANN contrôle aujourd’hui tous les noms de domaine et les adresses IP (DNS) dans le monde (c’est parce que l’ICANN a son siège social à Washington qu’il est soumis au droit américain). Devant cette hégémonie, le mouvement NETmundial fait la promotion d’une gouvernance plus ouverte, surtout suite à l’affaire Snowden, 2013.

Les autodafés.

L’État a toujours réagi violemment quand des livres contraires aux thèses officielles furent imprimés (Copernic en 1543, Giordano Bruno en 1600 et Galilée en 1633) ou quand on a osé traduire la bible en langage populaire (Martin Luther en 1523, William Tyndale en 1537 et Jean Calvin en 1542).

Voir les exemples récents des accusations de trahison et des tentatives d’emprisonnement de Julian Assange 2010, Bradley Manning 2010, Edward Snowden 2013 et Aaron Swartz 2013.

La réorganisation des connaissances

L’arrivée de l’imprimerie coïncide avec celle des premières grandes bibliothèques universitaires et surtout, lors de la Renaissance, avec une réorganisation du savoir autour des quatre facultés (arts, médecine, droit et théologie). Plus tard, un autre bond extraordinaire eut lieu avec le lancement de l’Encyclopédie de Diderot (1751-1772).

L’arrivée d’Internet oblige tous les réseaux scientifiques à se réorganiser, puis suscite l’apparition de Wikipédia (2001) et des grands projets de bibliothèques électroniques universelles : Google Livres (2004), Europeana de la Commission européenne (2008), la Bibliothèque numérique mondiale de l’UNESCO et de la Bibliothèque du Congrès américain (2009).

Les impacts de l’imprimerie
  • Finalement, en deux cents ans, beaucoup de citoyens devront apprendre à lire et à écrire.
  • Succédant à la culture orale du Moyen-Âge, la culture de l’écrit impose une approche linéaire et analytique faite surtout pour le contrôle, les inventaires et la production.
  • À la diffusion des livres religieux succède maintenant une multiplication des livres scientifiques.
  • Création de l’importante industrie du papier.
  • Développement de réseaux de distribution européens pour écouler les différents tirages.
  • Suscite la traduction des textes grecs et latins anciens.
  • Harmonise l’orthographe et la grammaire de la langue, donc codifie les langues vernaculaires, ce qui a eu un impact important dans la formation des identités nationales.

Les impacts de l’Internet

  • La démocratisation de la publication assistée par ordinateur (PAO) débute avec l’apparition du Macintosh (1984) ; l’ère de l’infographie en réseau commence.
  • Chez les professionnels de l’impression, les nouvelles étapes sont le Computer to plate et le Direct imaging.
  • La nouvelle génération de téléphones et de tablettes sans clavier (2007) fait émerger une nouvelle écriture médiatique (chapitre 5). À la culture de l’écrit commence à se superposer une culture des images-écrans.
  • La dématérialisation des services et des produits sous forme d’applications suscite une Net economy.
  • Les promoteurs des réseaux sociaux imposent à leurs usagers une contribution gratuite (sous les formes de détails personnels), laquelle développe une économie de la contribution qui les enrichit énormément (chapitre 6).
  • Deux modèles économiques commencent à se développer : un modèle privé et américain structuré autour de la sécurité et un modèle plus public basé sur les espaces de proximité (chapitre 6).

Voir ci-dessous les étapes d’Internet 1, 2 et 3 :

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